La gamification de la vie entend encourager les utilisateurs à réalisent des objectifs qu’ils se fixent en utilisant des mécaniques du jeu. Ces applications se multiplient, et on se penche aujourd’hui sur l’une d’elles, qui a la particularité d’être chinoise : Kwestr.
Kwestr est une application pour Facebook et Weibo (Facebook a un succès très limité en Chine pour diverses raison, Weibo s’y est imposé comme réseau social numéro 1). Elle permet au joueur de gagner des badges pour ses réussites dans la vie réelle, comme il le fait lorsqu’il récolte ses carottes virtuelles sur d’autres jeux sociaux.
Ce genre d’applications cherche à répondre à une demande des utilisateurs pour réaliser les projets qu’ils remettent sans cesse à “plus tard” car ils manquent d’incitations à progresser dans leur vie réelle. Le joueur choisit donc les “kwest” (que l’on peut traduire par “Kêtes”) qu’il veut réaliser : Kwestr lui en propose des déjà existantes, mais il peut aussi créer ses propres kwests.
Il doit alors remplir les étapes intermédiaires, qui font augmenter la “progression” de la Kwest, jusqu’à la finir et remporter alors le badge correspondant. Et c’est là que toute l’intégration au réseau social se situe : le joueur doit faire valider ses progrès dans ses kwests par ses amis. Plus la kwest est validée par un grand nombre d’amis, plus le badge distribué par Calvin le blaireau est joli et brillant, et plus il gagne de points pour progresser et s’évaluer par rapport à ses amis. La vérification par les amis permet aussi d’éviter les abus de tricheurs.
Et si le choix de la mascotte peut faire sourire en français, l’explication est dans le nom anglais de l’animal : le blaireau/badger distribue les badges…

Frank Yu a pour projet d’apprendre à faire du Kayak,
pratiquer la méditation, visiter un Zoo…
Les dynamiques du jeu utilisées sont donc un feedback continu sur les réussites du joueur, facilité par la décomposition de la kwest en étapes intermédiaires. Ainsi, plutôt que d’attendre plusieurs années avant de remporter le badge “Apprendre le mandarin”, le joueur verra ses progrès dès qu’il aura maîtrisé ses 50 premiers caractères. Le progrès est donc rendu visible par la décomposition en tâches réalisables qui engagent le joueur plus facilement que de grands objectifs généraux. Comme dans un jeu de rôle où pour “sauver le monde” il faut “délivrer la ville” et pour cela “aller parler au chef de l’armée menant le siège”. La récompense du badge ajoute un aspect entièrement extrinsèque, car l’on suppose que la motivation intrinsèque du joueur existe déjà car il a choisi la quête. L’aspect social apporte également les dynamiques du dialogue, du défi et de la compétition entre les amis.
Son fondateur, Frank Yu, a eu une carrière riche avant de fonder Kwestr et d’être un acteur majeur des start-up de Beijing : il fut successivement capitaine de l’armée américaine, journaliste dans les pays baltes pendant l’effondrement de l’URSS, a géré la XBox de Microsoft en Asie. Accompagné de Prashant Hirematada, CTO, et Emma ZhiYu Liao, directrice Etats-Unis, ils visent à créer un jeu social plus réel, qui amène le joueur à partager des évènements et des réussites qui intéresseront ses amis plus que d’avoir fait poussé une plante ou quelque chose d’autre (sic).
La monétisation se fera par le partenariat avec des marques qui, lors de leur plans médias, pourront créer des kwests particulières, offrir des réductions à ceux qui auront réussi des kwests définies…
Privilégiant le social sur la mobilité (l’application pour smartphone est en cours de développement, longtemps après le lancement de l’application pou réseau social), Kwestr est toutefois développé pour plusieurs réseaux sociaux. Mais il ressemble encore trop à une liste de choses à faire avec un très léger aspect ludique. Peut-on voir dans ces applications de gamification de la vie les prémisses de l’existence entièrement gamifiée décrite notamment par Jesse Schell ?
Sources : Kwestr.com, thenextweb.com(et photo de l’article), technode.com, agendabeijing.com